L’univers est un corps infini, vêtu de dure et dense peinture. Tana Chaney sans fin s’abandonne à la fièvre des profondeurs, quand des vagues d’énergie pure, pudiques et impudiques, emportent à vif l’étendue. Elle peint les plus secrets envoûtements du dedans, et chaque peinture, en plein orage mental, est trame d’immensité.
Mystique charnelle en errance, sidérante et somptueuse, allusive, possédée, et morsures de mort-vie en pleine peau-peinture. Des traces d’êtres, aux origines du monde, éclaboussent la nuit, comme des taches d’extrême vie. Dans les voiles de l’œuvre, dans ses replis de ténèbres, on voit tension étirée, densité de nuit, et saisissante présence de sources convulsives, venues soudainement du fond des âges. Ainsi s’ensacrent les flammes tendues des corps, sous le scalpel sans poids d’une lumière troublée, dans l’air raréfié des grands fleuves psychiques.
C’est le feu des étreintes premières, où l’air se brûle, où se corrodent les surfaces, où se purifient tous les signes. Les cieux denses de Tana Chaney absorbent tous les contours, en brumes profondes qui dématérialisent le monde. Le bleu fiévreux des confins, toujours s’éloignant, sublime au dedans l’humaine matière éperdue. Acculée à ses confins, la peinture de Tana Chaney est chargée jusqu’à l’os. La couleur n’est plus liée aux surfaces, elle est arrachée aux profondeurs.
— Christian Noorbergen
le plus vieux jaillissement est un début
donneur de possibilités il en fait sa cible
l’invisible plus palpitant que le visible
provoque la rencontre
vies et désirs entrechoqués
nouvelle voûte céleste à chaque étincelle
à chaque claquement de porte
l’indomptable sauvage vitalité
se cache sous la couche sereine de la peau
l’élan surgit de la fissure
par les lèvres du temps
dans le mouvement perd du rouge
dans le passage perd du noir
— Tana Borissova