Une légère oscillation réunit cinq artistes dont les œuvres témoignent de ce drôle de compagnon qu’est le corps. Michel Foucault dans sa conférence « Le corps utopique » , de 1966, le décrit comme un enfermement, une « vilaine coquille de [sa] tête » à partir de laquelle naissent les utopies. La véritable utopie serait un lieu hors de tous les lieux où nous aurions un corps sans corps, lumineux et limpide. Ici, dans cet espace noir, les artistes exposent de curieux objets révélant leurs utopies personnelles. Mains, gants, secondes peaux, chaise et cape trônent dans cet ancien cabinet de curiosité. Les objets, à la fois organiques et insolites, habitent le lieu et conversent entre eux.
Les œuvres de cette exposition racontent ce grand décalage entre ce qui se passe en nous et ce qui se produit dans l’immensité de l’univers ; la puissance que prennent parfois nos émotions, une secousse quasiment imperceptible à l’échelle du monde. Le corps est un étrange compartiment de voyage et à travers lui se déploie notre relation aux autres ; la proximité physique est souvent la promesse d’une distance émotionnelle et inversement. L’homme s’échappe du corps par le rêve mais ce sont les mains qui font l’artiste. Comme l’évoque Henri Focillon dans son Éloge de la main (1934), l’homme qui songe ne peut créer car ses mains sommeillent « L’art se fait avec les mains ».
Dans son livre Une très légère oscillation, Sylvain Tesson décrit l’exercice quotidien du journal intime comme la possibilité de se sauver d’un chaos à la fois intérieur et extérieur. Pour les artistes de cette exposition il s’agit du même mécanisme : créer dans le but de calmer l’effervescence interne.